Lettres du Chef qui Ouvre l'Orchestre

La composition musicale fascine. Plus généralement, la création d'un morceau de musique, d'un concert ou d'un opéra intrigue les spectateurs... et même les artistes !

Oui, la musique est un mystère et une magie... intangible.

Oui, tout part de l'inspiration.

Mais la manière avec laquelle on construit un concert ou un morceau de musique - au-delà du fait d'être inspiré, a toujours un point commun.

Il se résume en trois lettres : 

A = Action 

R = Réflexion

M = Maîtrise.

Avant de créer une œuvre, vous avez trois possibilités :

1. Commencer par un temps de Réflexion (R), un brainstorm, pour axer votre projet selon des paramètres préalablement définis.

> Exemple : "je veux une musique triste" est un point de départ réfléchi, qui oriente ensuite votre action (réaliser une musique "triste").

2. Débuter en acquérant la Maîtrise d'un élément absent (M). C'est le cas pour tout domaine inconnu.

> Exemple : si un metteur en scène vous propose de composer une musique pour une pièce de Victor Hugo, lisez la pièce et informez-vous de toutes les sources et circonstances possibles. Laissez imbiber votre esprit de vos recherches jusqu'à atteindre une forme de maîtrise. Cela sera bénéfique avant d'esquisser la moindre note.

3. Ne rien faire de tout cela ! Partir de l'Action (A), rêver, agir ! Et voir ce qu'il se passe ! Ce premier jet instinctif précieux contient une spontanéité qui ne passe pas par le cerveau mais par la vitalité.

> Exemple : vous improvisez au piano sans réfléchir, vous ratez, vous recommencez et vous retenez les quelques notes qui vous plaisent comme point de départ. La maîtrise et la réflexion suivront plus tard. Les enfants en bas âge procèdent toujours ainsi en apprenant une langue.

Parmi ces trois possibilités, il n'en existe pas une meilleure qu'une autre !

Les trois sont possibles et ont la même valeur. 

Peter Brook disait qu'il n'y a pas une meilleure manière qu'une autre de démarrer un projet !

Mais naturellement, ensuite, l'ordre des trois lettres ARM a une incidence et s'adapte à votre contexte.

Pour un orchestre qui doit réaliser un concert, je choisis de préférence l'ordre RMA, car nous avons des contraintes.

Plus le temps passe vers le concert, plus la pression augmente pour les musiciens et le staff. L'orchestre qui délivre un concert est donc dans un temps entonnoir. Aussi, les musiciens de cet orchestre passeront à l'action uniquement quand l'œuvre sera prête et préparée par le compositeur, le chef d'orchestre, le producteur, le staff, et les chefs de pupitre.

Si vous faites l'inverse (faire jouer votre orchestre symphonique sans maîtrise et sans réflexion), alors vous dilapidez l'énergie de dizaines de musiciens, qui fuiront à l'idée de s'engager dans un projet si confus.

À l'opposé, dans un projet "solo" sans concert, les facteurs temps et nombre sont remplacés par un espace libre. 

Là, je n'hésite pas à partir de rien ! ARM ! L'Action d'abord, puis je vais à l'étape R si je veux interroger les notes brutes, ou bien à l'étape M si je veux d'abord peaufiner ces esquisses.

En résumé 

Dans tous les cas, c'est l'inspiration qui guide votre projet. Mais c'est le temps qui le structure et appelle l'ordre de la combinaison (ARM, ou RMA, ou MAR, etc..).

Nous avons développé le "concept ARM " avec le musicien Jonathan Malnoury car nous aimons partager la notion de créativité et de réalisation.

Nous sommes heureux de vous partager ici un aperçu de cette approche. Nous croyons que la réussite de tout projet commence par une bonne Armatura ("équipement" en latin). Connaître son ARMure est toujours le premier pas #

Sylvain AUDINOVSKI

LIENS

• Jonathan Malnoury
• Peter Brook
• Comment gagner le temps qu'on n'a pas ?
• Comment changer la perception du temps ?
• D'où vient l'inspiration ?